MISSION D'INFORMATION PARLEMENTAIRE SUR LE FONCIER AGRICOLE - Syndicat Départemental de la Propriété Privée Rurale
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MISSION D’INFORMATION PARLEMENTAIRE SUR LE FONCIER AGRICOLE

Le Rapport de la mission a été présenté à l’Assemblée le 5 décembre 2018.
Ce Rapport est important car les propositions qui y sont inscrites seront probablement reprises comme
fondements de divers projets de lois dans les années à venir. Et il y a donc de quoi s’y intéresser ..
Avant d’en synthétiser le contenu, il est intéressant de savoir que cette mission d’information commune sur le foncier agricole a été constituée à la demande du député M. Dominique POTIER sur la base de l’émotion suscitée par « l’achat de 1700 ha de terres arables par un consortium chinois, en 2016, dans l’Indre ».
Il y a là, de toute évidence, d’une nouvelle stratégie FNSAFER pour disposer du droit de préempter sur la vente de parts de société malgré 3 rejets du Conseil Constitutionnel à ce sujet : loi d’Avenir, loi Sapin 2 et loi pour lutter contre l’Accaparement des terres agricoles.
Il est malheureusement à constater que l’opinion publique est plus « émue » par l’achat ponctuel de 1700 ha par des étrangers que par la disparition annuelle de plusieurs dizaines de milliers d’hectare de SAU ou par le départ en retraite de 50 % des agriculteurs dans les 10 ans à venir ?
Cet opportunisme SAFER ne nous incite guère à la confiance dans l’étude en question.
Ce rapport comprend 5 parties :

  • La protection du foncier avec une grande dimension environnementale ;
  • Le partage du foncier ;
  • Les propositions communes des deux rapporteurs ;
  • Les propositions de Madame PETEL (LREM) ;
  • Les propositions de Monsieur POTIER (PS).
    La protection du foncier
    Le constat n’est pas dénué d’intérêt mais on peut regretter l’aspect subjectif ou orienté de certaines observations.
    Il est heureux que soit mis en lumière une artificialisation galopante essentiellement au détriment des terres agricoles.
    Nous la dénonçons depuis des lustres. Pour autant, l’imprécision du constat est surprenante puisqu’il est noté d’un côté une artificialisation à hauteur de 16 000 ha par an et de l’autre à hauteur de 61 200 ha par an.
    De même, il est à juste titre affirmé que la consommation de SAU se fait sans aucune prise en compte de la qualité des sols et que c’est sur les meilleurs sols que se fait l’extension urbaine.
    On peut également accepter que la diminution des terres agricoles soit liée à une augmentation des « délaissés » découlant de difficultés socio-économiques auxquelles notre agriculture est confrontée.
    On peut même se féliciter du constat qu’une part significative de la diminution de SAU soit liée à un Statut du fermage peu attractif voire même dissuasif pour les propriétaires mais il est inexact de l’imputer exclusivement à l’aspect peu rémunérateur du fermage. Bien des propriétaires se détournent aussi de la location pour les dénis de propriété liés au Statut du fermage et au Contrôle des structures.
    Au-delà de ceci, il est affirmé (je cite) « la visée spéculative et la singularité du statut du fermage – nécessaire à la protection des fermiers – expliquent la rétention foncière qui conduit au développement de friches agricoles davantage responsables du recul du foncier agricole que ne l’est l’artificialisation des sols !». En bref, il y aurait plus de terres incultes du fait de la spéculation que de pertes de surfaces via l’artificialisation ?
    Très contestable également le fait que le rapport considère comme positif et spécifique que le prix des terres agricoles français soit très bas, en comparaison de beaucoup de nos voisins européens. Il est dit que, bien qu’ayant doublé en quelques années, un hectare de terres coûte en moyenne 6000 € en France contre 10 000 à 20 000 € en Grande-Bretagne, en Allemagne et au Danemark, et jusqu’à 50 000 € aux Pays-Bas. Cet état de fait est imputé à la puissance publique et à l’encadrement du montant des fermages.
    Comment en terminer avec le diagnostic sans ajouter que le rapport considère les mobilisations citoyennes sur ces questions comme un élément sociétal favorable à une évolution positive de la situation.
    Le partage du foncier.
    Il est aussi dit (je cite) « en moyenne, un propriétaire foncier détient 2,5 ha et un exploitant exploite 70 ha soit un rapport de 1 à 30 ». Ce phénomène de concentration foncière (par inversion du rapport de force) pose des questions de rentabilité et d’équité. Il en ressort une nouvelle fois que le Statut du fermage n’est plus attractif .. ce qui peut nous réjouir.
    Il est enfin constaté l’installation de plus en plus d’agriculteurs dont l’agriculture n’est pas le métier principal. Il est par ailleurs dénoncé le travail délégué qui consiste à faire réaliser par un prestataire de services tout ou partie de ses travaux agricoles avec les risques que ces pratiques aboutissent à une agriculture sans agriculteur.
    On n’échappe pas, pour autant, ensuite à des considérations bien conformes aux objectifs FNSAFER.
    Ainsi, il est déclaré qu’aujourd’hui la terre est à considérer comme un bien de l’humanité et que ce bien est fragilisé par le fait qu’aujourd’hui plus de la moitié de la SAU française est gérée par des formes sociétaires, souvent abstraites, derrière lesquelles il n’est pas toujours possible d’identifier des propriétaires physiques.
    Par ailleurs, il est soutenu qu’aucune société pouvant être la propriété d’une personne morale non identifiable ne soit ou ne doit être en mesure de détenir du foncier. Il est également exprimé l’inquiétude des risques liés à une financiarisation de l’agriculture.
    Il s’en suit, bien des considérations discutables prises comme des vérités absolues.
    Des réponses divergentes
    Face à toutes ces considérations, les propositions des 2 rapporteurs, Madame Anne-Laurence PETEL, député LREM, et Monsieur Dominique POTIER, divergent sensiblement. C’est donc séparément que sont présentées les propositions de l’une et de l’autre.
    Cette divergence marquée ne découle pas de la complexité du sujet et la difficulté de trouver des réponses adaptées à toutes les situations ou acceptables pour tous les acteurs comme on pourrait être tenté de le croire.
    En fait, elle est révélatrice de 2 idéologies distinctes : le libéralisme et une volonté exprimée par la première de s’émanciper des idées reçues s’opposent aux positions politiques et dogmatiques du second.
    Il convient donc de saluer un rapport qui, apparemment, apporte un réel contrepoids aux positions FNSAFER.
    L’avenir nous permettra de voir s’il s’agit bien là d’une réalité ou d’un artifice puisque les 2 rapporteurs se sont tout de même mis d’accord sur 15 propositions communes et pas des moindres.
    Quelles suites ?
    La nécessité d’une remise en cause du Statut du fermage semble désormais acquise. Pour autant, il convient d’être circonspect sur la suite qui y sera donnée surtout si la Propriété privée est exclue du débat.
    Malgré les déclarations de pragmatisme et de bonnes intentions comme celles de soumettre les propositions au débat, l’expérimentation des évolutions envisagées, etc.. il est difficile d’imaginer, sur la base des propositions communes, que l’avenir n’induise pas un surcroit de lourdeurs et contraintes administratives pour tous les acteurs de la ruralité et une accentuation marquée du déni de propriété.
    Tout ceci nous fait obligation d’expliquer aux élus de la majorité la face cachée et le côté pervers de l’action SAFER, le non-sens économique du Contrôle des structures et la nécessité de souplesse pour adapter le Statut du fermage aux situations de terrain par accord entre les parties.
    C’est à la seule condition que cesse le découragement des bailleurs que les projets de loi à venir sur le foncier agricole seront bénéfiques pour notre agriculture.
    Patrick de Kerizouët