La configuration du monde agricole change et il est de bon sens de penser que ce changement va s’accentuer dans les années à venir pour des raisons principalement démographiques, sociétales et environnementales. Il y a là une évidence facile à percevoir dès lors que l’on porte attention à la ruralité. Ce qui est beaucoup plus difficile est de projeter dans les réalités de demain et surtout d’en mesurer les conséquences pour nous propriétaires qui nous devons d’anticiper au mieux. 7 Les choses se déroulent rarement comme on le croit. C’est donc avec prudence que je vous fais part de mes premières réflexions. Quoi qu’il advienne, elles auront le mérite d’une sensibilisation. Faute de temps, mon propos se limitera à constater les 2 changements majeurs qui s’opèrent actuellement et de tenter d’en tirer les conséquences prévisibles ..
Le départ en retraite annoncé de près de 50 % des agriculteurs dans les 10 années à venir.
Un tel chiffre est impressionnant mais, après réflexion, il n’a rien de très surprenant puisqu’il découle du babyboom des années 50. Le problème vient du fait que les départs sont très loin d’être compensés par l’installations de jeunes agriculteurs. Les statistiques donnent 1 installation pour 2 à 3 départs avec peu d’espoir d’une intensification des installations à venir. Tout ceci aura donc comme première conséquence une réduction sensible du nombre d’agriculteurs accompagnée d’une disponibilité brutale d’importantes surfaces agricoles devenues libres. Divers phénomènes peuvent venir limiter la libération des terres. Le premier est la création de nombreuses petites structures agricoles. C’est un fait bien réel mais qui laisse place à beaucoup d’échecs et ne devrait donc pas changer fondamentalement la donne. De même, face à une retraite MSA peau de chagrin, bon nombre de propriétaires – exploitants poursuivent une activité sur leurs propres terres sous le nom de l’épouse et en faisant appel à des ETA qui sont aujourd’hui nombreuses et aptes à exécuter quasi tous types de travaux. Tout ceci ne parait cependant pas de nature à entraver durablement la libération de terres et, par conséquence directe, la croissance de la taille moyenne des exploitations agricoles. Il ne se justifierait pas de se préoccuper de tout ceci s’il n’y avait pas le risque que l’offre pléthorique n’induise une grande sélectivité sur les terres recherchées et donc sollicitées en CDOA. Le raisonnement prévisible est simple ; « il est désormais plus facile d’obtenir des terres, pourquoi solliciter les mauvaises terres dont le rendement est bien moindre que celui des bonnes terres pour des coûts de travaux et d’usure de matériels souvent supérieurs. Par ailleurs, j’ai bien noté qu’en Commission des structures, le seuil d’agrandissement excessif prévu par le SDREA va me limiter en agrandissement. Pour cette raison, j’ai bien intérêt à ne solliciter que les bonnes terres. » Divers cas traités en CDOA illustrent déjà cette pratique naissante.
La réduction des activités de productions animales notamment bovines.
L’origine de ce phénomène est facile à comprendre. A l’instar de la profession, les éleveurs vivent souvent mal et se sentent mal aimés « agribashing » : contraintes d’élevage impactant fortement la qualité de vie, pb majeur du manque de main d’œuvre, rentabilité médiocre amplifiée par la flambée des prix des matières premières, agressions subies au titre du bien-être animal, empreintes carbone liées aux déjections, consommation de viande en baisse. Bref, les éleveurs se découragent et tendent à réorienter leur activité vers la grande culture. Il y a donc risque d’une réduction sensible des besoins en herbe pour la consommation animale et donc un désintérêt progressif pour les prairies naturelles.
Et le propriétaire dans tout ceci ?
Il est probable qu’une majorité de propriétaires bretons que nous sommes aient à subir, à un moment, ce désintérêt pour toutes ou certaines de leurs parcelles. Faute d’y être préparés, ils ne pourront que subir en étant totalement désemparés comme c’est parfois déjà le cas suite à décisions de la CDOA. C’est pourquoi, il est important d’explorer de nouvelles pistes et de baliser toutes les solutions possibles à même de permettre de tirer le meilleur parti possible de nos terres et, en l’occurrence, des parcelles délaissées par l’agriculture traditionnelle. C’est le rôle de votre syndicat de s’y impliquer. Il y fort à parier que, découvrant des solutions attrayantes ou simplement satisfaisante pour eux, certains trouvent la motivation pour relever des challenges comme celui de reprendre la maîtrise de leurs biens en tirant profit de l’explosion des ETA. Les programmes liés à la sensibilité environnementale actuelle sont susceptibles d’induire de belles opportunités.